Le titre en lui-même et le dessin portent tout l'élan de reconnaissance que j'éprouve envers M. Maurice Breault, maintenant décédé, et l'Atelier d'Art-Thérapie de la Fondation québécoise du cancer que j'ai fréquenté en 2004-2005 et où j'ai découvert le dessin et la peinture. L’endroit où je devais être Étrange synchronicité… Je découvre le dessin au moment où l’on trace des lignes sur mon corps. Je sors de l’Hôpital Notre-Dame, je fais quelques pas et j’arrive à l'Île Maurice. L’appel est incroyable, c’est l’endroit où je dois être! Ici, tout est matière : le papier, la colle, les pots de peinture, les pinceaux dans l’eau, les craies, les crayons, les cartons. Pendant que mes mains s’affairent à je ne sais trop quoi, une conversation s’amorce en douceur avec mes collègues au coco nu. Un partage. Hélène fait tourner l’encre sur le papier et à tout coup, ça fait des fleurs fluides. Quelle grâce! Myriam s’installe en bout de table et elle te tortille en deux minutes un beau nu multicolore, avec des copeaux de craies pastel mélangées. Denis m’emprunte un dessin d’oiseau et, à l’envers, ça devient un casque d’hiver. Ça nous épate! D’habitude, il peint à la tropicale. Cette nourriture est bonne pour moi. C’est comme si toute cette ambiance tactile qui règne à l’atelier répondait dans ma matière chair aux intempéries de l’invisible : aux bordées de cheveux, aux pluies de cils, aux tempêtes subites de questions, aux branches sèches qui me servent parfois d’articulations. Malgré mes doutes de toute nouvelle créatrice, ce qui sort de moi à l’atelier me renforce, me répare, m’enracine. Je le sens! Dans l’endroit où je devais être, se tenait un homme droit, un artiste expérimenté qui en voyait beaucoup plus qu’il n’en disait sous ses grosses lunettes de rétro-voyant. Merci, Maurice Breault, d’avoir gardé l’élégance de la non-analyse de nos oeuvres et merci de tout cet encouragement à laisser aller nos mains.